UN SINGE SUR LE DOS

ARTE 20.45 TÉLÉFILM LE RECIT D'UN HOMME QUI PERD TOUT À CAUSE DES RAVAGES DE L'ALCOOL

Le Monde | 07.11.2009 à 11h39 | Par Véronique Cauhapé

L es premiers plans abordent le sujet de façon frontale. Francis (Gilles Lellouche) et deux compagnons de misère traînent leur déchéance sur un banc public. Propos pâteux, corps avachis, regards vagues. Par terre, des bouteilles vides, des sacs de couchage, un chariot de supermarché. Puis Francis se souvient. Flash-back sur sa vie d'avant, aux côtés de sa femme et de son fils, son boulot de commercial, ses potes de virées nocturnes. Une existence heureuse que viennent pourtant pourrir des excès d'alcool fréquents et qui finissent par ne plus duper personne, pas même Francis qui tente d'arrêter. replonge, ne sait plus comment faire. perd son boulot, ses amis, sa famille .

A travers ces éclats de bonheur d'une vie révolue, c'est l'histoire d'une chute puis d'une résurrection que nous livre Un singe sur le dos. le bouleversant téléfilm de Jacques Maillot. Francis commence par refuser la main tendue d'un homme, Louis (Marc Chapiteau) qui, "passé par là". lui conseille de se rendre aux réunions des Alcooliques anonymes ("AA"). Se raconter n'est pas son truc à Francis. Ce sont pourtant tous ces gens, Louis, mais aussi Jeanne (Carole Franck), des hommes et des femmes venus de tous horizons, unis par la même dépendance qui vont l'aider à se reconstruire .

Récit âpre et pourtant d'une grande sensibilité, Un singe sur le dos met en scène des acteurs qui excellent dans cette justesse de jeu que chacun met en place, jusqu'à parfois nous donner l'impression d'être dans un documentaire. Une prouesse à laquelle les interprètes, le réalisateur et son scénariste Pierre Chosson sont parvenus en allant assister à des réunions d'alcooliques anonymes. L'expérience a nourri les uns et les autres. "J'ai été bouleversée parce que la parole échangée n'était jamais mondaine, jamais inutile. C'était une parole pleine, intime, lucide et parfois drôle. Pendant ces réunions, on parle pour ne pas boire". confie Carole Franck.

Epoustouflant, Gilles Lellouche s'est lui aussi documenté, a regardé les fictions faites sur le sujet pour éviter de copier ses prédécesseurs. Il s'est lui aussi rendu chez les "AA" pour être au plus près et éviter "d'en rajouter dans le pathos ou le romantisme". Résultat, l'acteur donne un jeu d'une intensité physique. d'une violence rentrée qui émeut dans ce qu'elle dit de la souffrance, de la lutte et de l'impuissance dans lesquelles se débat son personnage.

Enfin la grande idée de Jacques Maillot est d'accompagner la justesse de ces acteurs par une réalisation et un montage qui se déstructurent au fur et à mesure qu'avance l'histoire. A l'image de l'émiettement que subit la vie de Francis.

(France. 2009, 90 min). Avec Gilles Lellouche, Carole Franck, Marc Chapiteau, Laurence Cordier.